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Cineflower
12 novembre 2008

Quatre Nuits avec Anna (Cztery Noce Z Anna, Jerzy Skolimowski, 2008)

Quatre_nuits_avec_Anna                  On pensait avec My Name is Hallam Foe tenir le film le plus inclassable de l'année. Que nenni. Autre film sur le voyeurisme (1), autre film d'un érotisme glaçant et dérangeant, Quatre Nuits avec Anna lui dame in fine le pion, au gré d'une construction moins linéaire et référencée et d'une mise en scène plus psychanalytique, qui épouse la structure mentale défaillante de son héros (2). Evoquant des genres aussi disparates que le surréalime fantastique, le burlesque, le mélo et le film psy comme autant de fantômes, le film de Jerzy Skolimowski demande du temps avant de se laisser apprivoiser, le prix à payer pour rentrer dans la psyché maladive de son personnage principal. D'un solitaire qui confine à l'autisme, le bougre tombe un jour au détour d'un hanger sur le viol d'une jeune femme. Traumatisé, il nourrira désormais un intérêt obsessionnel pour la victime, obsession d'autant plus intriguante que le metteur en scène refuse de nous en donner les clés: amour fou? empathie profonde? culpabilité aigüe? schizophrénie identitaire? On navigue en eaux troubles. Narration heurtée, raccords sonores, musique obsessionnelle, symboles renvoyant à nos peurs les plus primitives, comme autant de bribes éparses et de connexions endogames d'un esprit malade, dont on finit même par se demander si ce qu'il vit ne serait pas en fait le fruit de son imagination. Le réalisateur polonais use de cadres rigoureux et âpres, d'une grande force tellurique, dont la sensualité explose lors des visites nocturnes à la dame de ses pensées: par un film quasi-muet (qui en donne en tout cas l'impression), il réaffirme la beauté du langage corporel et des mouvements, opposant au relatif classiscisme d'Hallam Foe une mise en scène à la fois plus ancestrale et plus moderne (2). Le traumatisme subi a fait du héros un être aussi psychotique qu'inoffensif, mi-bête mi-enfant. Il est logique que, fuyant la pluralité du parler, le mariage de ces écarts soit célébré par le langage le plus universel qui soit, celui des corps.

(1) Rappelons brièvement le pitch: un solitaire désoeuvre s'attache de manière obsessionnelle à une femme dont il a surpris le viol quelque temps auparavant. Quatre nuits durant, il s'introduit chez elle à son insu...
(2) Les deux films sont de toute manière fortement conseillés.


                                                                                           Ben Evans (D.W.: pas vu / B.E.: must see)

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