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Cineflower
5 octobre 2008

No Country For Old Men – Non, ce pays n'est pas pour le vieil homme (No Country For Old Men, Joel & Ethan Coen)

non__ce_pays_n_est_pas_pour_le_vieil_homme                2008 restera comme l'année du retour du grand cinéma hollywoodien. Cela ne pouvait définitivement pas se faire sans le retour en forme de ses deux frangins les plus doués, qui déboulent avec ni plus ni moins que leur meilleur film. (1) Après des passages par le film de détective, le film de gangster, la screwball comedy, et le film noir, c'est au tour du dernier grand genre de l'âge d'or du cinéma américain de passer à la moulinette de ces touches-à-tout de génie: le western.
                Quoi de neuf au pays des frères Coen? Dans la forme, leur science du cadre s'est encore affinée, éclairant No Country for Old Men et l'imposant comme leur film le plus léché: chaque plan dégage une impression de beauté définitive, surpassant les magnifiques Miller's Crossing et The Barber. Leur sens du montage s'est aussi aiguisé, permettant aux scènes de suspense de No Country for Old Men d'être les plus intenses des trublions. Mais dans le fond, pas grand chose, leur petite musique reste la même, tant cet opus fait à la fois figure de synthèse, d'aboutissement - esthétique et thématique - et de retour aux sources au sein de leur filmographie (2). C'est de la noirceur macabre de Fargo que ce film se rapproche le plus, ajoutant à l'original la dimension épique des grands espaces de l'Ouest et le sens de la parabole des aventures homériques de O'Brother. Si les films des Coen sont pour beaucoup une relecture de l'histoire de l'Amérique, No Country for Old Men laisse le premier la sensation évidente d'une vérité générale, d'un mélange parfait entre l'anecdotique et l'universel, entre l'homme lambda et le monde. Le désenchantement latent qui imbibe la pellicule est très "Peckinpahien", le film peut facilement être vu comme une version moderne du western crépusculaire. Une version détournée et déceptive, toutes les scènes de flingues étant systématiquement désamorcées ou hors-champs. L'un des tours de force du film est là, dans le paradoxe de se trouver constamment en terrain familier avec nos petits Coen, et en même temps constamment surpris et dérouté par la teneur du récit. Que ce soit par le personnage de Chihurg, phénoménal Javier Bardem, ange exterminateur aussi drôle que terrifiant, réellement à part dans la filmographie des deux frangins. Par le refus (quasi-)systématique des scènes de fusillade, mais aussi des scènes de rencontre entre les personnages principaux. Ou même par l'issue incertaine du récit, alors que le héros est représentatif de ceux qu'ils ont toujours mis en scène. Car Josh Brolin marche bien dans les bottes des destinées dérisoires et ubuesques des loosers pathétiques et diablement attachants de Fargo et The Barber. Le genre de type qui, croyant apercevoir un jour un oasis forcément illusoire, saute à pieds joints dans une béchamelle infernale. Le rêve américain n'est qu'un leurre chez les Coen. Si ce pays n'est pas pour le vieil homme, il n'est pas non plus pour les petites gens. Il n'est que pour les assassins. C'est bien le retour du Far-West sauvage: tue, ou crève.

(1) Devant, à mes yeux, The Big Lebowski, Barton Fink et Miller's Crossing
(2) Mais ça n'est pas une redite, attention, ça n'a rien à voir.

                                                                     

Ben Evans (D.W.: must see / B.E.: indispensable)

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