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Cineflower
23 novembre 2010

The Social Network (David FIncher, 2010)

network            En route vers la virtualisation totale du monde, vers la panoptique universelle et réciproque. The Social Network résonne autant comme un drame au présent que comme la prophétie de la tragédie du futur (proche), voire comme la fusion glaçante entre les deux. Un autiste surdoué crée un groupe simplement pour faire partie d'un. La machine s'emballe. A l'instar de toute œuvre, le réseau s'émancipe de son créateur et devient autonome. (1) Peut-être au-dessus de tous mais en tout cas déconnecté du monde, Citizen Zuckerberg incarne toujours davantage l'homme du futur: une connexion à la planète par un simple click, mais une solitude peut-être accrue, sinon désespérément immuable. La multiplication des moyens de communication entraîne paradoxalement la raréfaction des liens. Antonioni parlait de l'inadéquation existentielle douloureuse entre les aspirations modernes de l'homme et les valeurs conservatrices de la société. Fincher évoque l'écart grandissant entre nos aspirations et un avenir que nous construisons pourtant. L'humain est, sans le savoir, un masochiste tragique.

              Toujours virtuose et parfois faussement maladroite (2), la mise en scène et son montage impatient traduisent régulièrement l'inadaptation de son prodige. Le film demande une attention de tous les instants tant il déroule lui aussi (3) à toute vitesse ses enjeux, sans vulgarisation excessive. S'il confirme le goût du cinéaste pour la narration alambiquée et le puzzle, son thriller romanesque se rapproche surtout de son divin et ténébreux Zodiac (4). Fincher ajoute à ses marottes habituelles (obsession, paranoïa, solitude, déliquescence, pour ne citer qu'elles) celles du capitalisme sauvage: jalousie, cupidité, ambition, pouvoir. Il a aussi l'habileté de délivrer un portrait en demi-teinte de son héros, pas franchement aimable, mais pas forcément coupable non plus. L'interprétation est libre. Fieffé salaud ou victime d'un système biaisé qui entrave l'innovation et les génies? Œuvre inépuisable, The Social Network ne privilégie jamais l'émotion ou la réflexion au détriment de l'autre mais impressionne sur tous les tableaux. L'œuvre symptomatique d'une époque, d'un futur (déjà) présent.

(1) On pense évidemment au chef-d'œuvre absolu Ghost in the Shell.

(2) A l'instar du génial champs/contrechamps initial.

(3) Zuckerberg n'a que faire de se faire comprendre de ceux qui peinent à suivre son génie.

(4) On parle ici des deux meilleurs opus du réalisateur.

                                               Ben Evans (D.W.: must see / B.E.: indispensable)

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