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Cineflower
23 décembre 2008

Le Bon, la Brute et le Cinglé (Joheunnom nabbeunnom isanghannom, Kim Jee-Woon, 2008)

cingl_                             On ne pourra pas reprocher à Kim Jee-Woon d'avancer masqué: le titre déjà annonce avec fracas la relecture coréenne du western spaghetti léonien (1): sadisme exacerbé, gueules patibulaires, mais presque, violence sèche, argent et vengeance comme seuls objectifs, flashback partiels, gros plans, clins d'oeil directs, superbe scope, les passerelles nombreuses entre les deux oeuvres faciliteront sûrement l'accès pour les spectateurs occidentaux. C'est pourtant sa sauce orientale qui permet au plat de gagner toute sa saveur, pas tant pour le contexte (2) que pour sa vitalité galvanisante et son inventivité de tous les instants. (3) La caméra, mobile, intenable, expérimente tous les mouvements, toutes les folies, avec une générosité jamais prise en défaut. Forcément, parfois, quelques scènes pourraient paraître légèrement brouillonnes, mais chaque plan respire un tel amour du cinéma, un tel plaisir d'en faire que ça en laisse baba. La scène inaugurale du train, la fusillade centrale au marché et la course-poursuite finale sont des merveilles. C'est simple, certaines scènes d'action, par leur folie dévastatrice et leur rafraichissante furie, nous feraient presque croire à du Tsui Hark. Ou à du film d'arts martiaux HK de la belle époque. Ce n'est pas un petit compliment. Exit le néo-réalisme léonien, place à un cinéma diapré, étourdissant et artisanal. Exit la noirceur de la botte, place au burlesque est-asiatique. C'est potache, c'est hilarant. Toute la veine comique de l'oeuvre, comme ses aspects les plus émouvants, est portée par le génialissime Song Kang-Ho. La folie du film est la sienne. C'est à la fois l'atout majeur et le principal défaut de l'oeuvre: Kim Jee-Woon n'est pas vraiment un grand directeur d'acteurs. Jung Woo-Sung insipide, Lee Byung-Hun plus charismatique que talentueux, sont totalement éclipsés par Song Kang-Ho, qu'on parierait même excellent devant la caméra d'une chèvre. Sa finesse de jeu est sans pareil, nous passant du rire aux larmes (3) avec un aplomb déconcertant. Les fans de Park Chan-Wook et de Bong Joon-Ho le savaient déjà de toute manière: à chaque apparition, on crierait au plus grand acteur du monde. Rien que pour lui, le film est à ne pas manquer. On en oublierait presque la fraîcheur, l'invention, la générosité. Tout n'est que plaisir.

 (1) Même si on trouvera également des références à d'autres icônes du genre, comme Django.

  (2) La Mandchourie des années 30.

  (3) Le film souffrira d'ailleurs inévitablement de la comparaison lors de l'inévitable duel à trois final. On ne se frotte pas impunément à la Danse de la Mort.

  (4) Dans un rôle voisin de ceux qu'il tient dans Memories of Murder et The Host.

                                                                                             

                                                                                    Ben Evans (D.W.: must see  / B.E.: must see)

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