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Cineflower
5 octobre 2008

Les Harmonies Werckmeister (Werckmeister Harmoniak, Béla Tarr, 2001)

harmonies_werckmeister             Plus rien ne serait jamais comme avant. C'est avec Les Harmonies Werckmeister qu'à l'instar de beaucoup d'autres je découvris le cinéma de Béla Tarr (Dieu, donc). Ce fut un choc. Ces plans-séquence lents et interminables (1), cette sublime musique lancinante, ces mixages sonores sourds et entêtants, cette poésie sourde et désenchantée, ces travellings, cette steadycam virtuose... L'immersion fut immédiate, l'hypnose profonde, le coup de cœur définitif.

            Qu'en est-il maintenant, au regard du reste de la filmographie du divin magyar? L'enthousiasme est intact. Juste à la droite du Père et de son tango avec le diable, Les Harmonies Werckmeister est un chef-d'œuvre éclatant, parfait, effarant. Une poésie romantique sur le dialogue de sourds entre corps et métaphysique, une élégie lumineuse dont le rayonnement n'a pas fini de nous alimenter et de nous éblouir. (2)

            Sarabande hallucinante et hallucinée, Les Harmonies Werckmeister nous entraîne dans le sillage de Janos, postier de son état fasciné par la genèse de l'univers. Son destin sera l'allégorie du conflit qui se joue entre la connaissance et l'obscurantisme (3), qui lui est allié des ténèbres. Ténèbres de l'âme au règne desquelles a peut-être contribué un certain Werckmeister. Le film érige la promotion du 1 (4) en négation de vie, modèle unique associé au totalitarisme. La menace est réelle, la fin du monde toujours imminente. Dans cette optique, l'Art peut jouer un rôle essentiel. Jusqu'à quel point? Pour survivre, ne faut-il pas se soumettre aux diktats? Peut-on sauver notre conscience, notre âme? Janos n'est-il pas au fond le plus naïf de tous? Nos efforts sont-ils vains? La damnation du film éponyme est peut-être scellée d'avance. Toute avancée cognitive ou artistique semble vouée à l'échec. (5) Apathique, la population ne l'est toutefois pas encore à 100%, semblant garder au fond d'elle une étincelle d'humanité, d'empathie, de pitié, dernier vestige semblant encore résister avant l'extinction totale. Tout espoir n'est peut-être pas perdu. Peut-être. Même si...
            L'Histoire fait-elle bien les choses? Coïncidence ou pas, Les Harmonies Werckmeister reste à ce jour le film idéal pour aborder le cinéma opaque et obscur de Béla Tarr. Si les voies de Dieu sont impénétrables, c'est par Les Harmonies Werckmeister que la porte d'entrée se pousse avec le plus de facilité...

(1) En gros, chaque scène est constituée d'un seul plan.
(2) Les Harmonies Werckmeister rentre facilement pour moi dans le top 5 de ce nouveau millénaire.
(3) Thématique déjà abordée dans Satantango.
(4) Le 1, c'est le tout pareil, la copie
(5) Même si le constat est salutaire et juste, on ne peut que souligner l'ironie de la situation, en regard de la révolution cinématographique que le metteur en scène hongrois nous propose.

                                                                Ben Evans    (D.W.: vital / B.E.: vital)

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