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Cineflower
31 octobre 2011

La Dernière Piste (Meek's Cutoff, Kelly Reichardt, 2011)

ladernierepiste         Dans tous les festivals, il n'y en a eu que pour The Artist. The Artist par ci, Dujardin par là, en passant par le jeu du chien ou l'émotion de la petite-fille Fairbanks. Pourquoi pas, après tout, il y a eu bien pire, et voilà un film qui faisait franchement plaisir à voir. Ce qui n'empêche de regretter le passage sous silence de l'autre réutilisation du format des origines - 1,33:1 -, moins roublarde mais plus convaincante et, pour tout dire, magistrale.

 

         Kelly Reichardt réinvente le western originel, en ressuscite les archétypes, réactualisant le propos en donnant la part belle aux femmes. On pense forcément, pour cette raison comme pour d'autres (1), au magnifique Convoi de Femmes de William Wellman, dont la modernité était aussi de faire de la femme, au sein d'un genre souvent machiste, le point central de l'évolution. Aragon ne l'avait pas tout à fait dit, mais la femme est peut-être, aussi, l’avenir du western. Surtout, Kelly Reichardt met en scène son film avec une épure voisine d'un Robert Bresson (davantage que d'un Monte Hellman): pas d'existentiel ou d'incommunicabilité ici, La Dernière Piste est gravée dans le marbre des classiques. (2) La beauté suprême du film - au-delà de sa photographie qui est, au moins, une merveille - tient justement à ce qu'il n'a pas honte de n'être qu'un "simple" western: pas de psychologie, pas plus d'afféterie, seulement les archétypes et l'appel des grands espaces - de la profondeur, ici, format oblige -. (3) L'épure de l'œuvre finit par toucher au mythe: seuls y comptent les actes, l'avancée, la découverte: c'est le temps des pionniers. Plus que réaliste, l'image se fait aussi le reflet d'un monde souterrain qui la travaille et qui serait l'essence du western, son ghost. Et quand l'aventure se termine, peu importe finalement la destination atteinte. Reste surtout le sentiment d'avoir vécu l'épopée matricielle, celle qui contient toutes les autres. Au commencement était Michelle Williams.

 

(1) la scène de descente des caravanes le long de la pente

(2) Il n'est ainsi pas étonnant que le héros masculin renvoie le racisme ignorant et la misogynie patente des premiers films du genre.

(3) là où William Wellman, dans son film susnommé, se laissait aller à une, certes superbe, course-poursuite stylisée entre amoureux en devenir

 

         Ben Evans (D.W.: pas vu / B.E.: indispensable)

 

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