Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Cineflower
30 juin 2011

The Tree of Life (Terrence Malick, 2011)

 

treeoflife

         On s'est beaucoup gaussé de la prétention du dernier Malick. C'est probablement un (double) tort, nous y reviendrons. A l'heure où l’on se gargarise des films sur le quotidien le plus banal - les films de boniches chers à Jean-Pierre Mocky -, il est forcément facile de dénoncer l’ambition peu commune de celui qui essaie par les images et le son de raconter le (son) grand Tout. Facile, donc, mais surtout dommage, tant l'enrichissement qu'il procure dame le pion à la frustration qu'il provoque.

 

         Si Tree of Life peut paraître fermé, c’est peut-être avant tout qu’il englobe le cosmos. Que peut-il y avoir en dehors du Tout, sinon Rien ? L’œuvre embrasse le monde dans son ensemble, de son commencement à la fin des temps, intégrant l’histoire de l’humanité à celle de l’univers. Si le début rebuta un peu par son esthétique léchée et bigarrée, la conclusion suscita les mêmes railleries, mais pour de mauvaises raisons semble-t-il. Terminant sa partie contemporaine par une morale pas glop, le metteur en scène y évoque une (sa) vision de la fin de l’existence terrestre, vision forcément hautement personnelle. (1) La grâce est réelle, le temps suspendu, mais la scène peine à transporter les contradicteurs. Mais qu’en aurions-nous bien à f….. d’être d’accord avec le cinéaste? Faudrait-il être partisan pour apprécier ?? Il faut toutefois noter le changement : jamais Terrence Malick ne nous avait présenté sa vision avec autant de clarté.

 

         La beauté du cinéma transcendantal de Malick reposait en partie sur l’humilité du questionnement qui y était à l’œuvre, de celui qui pense mais n’impose pas. Le corpus, uniquement composé de grand œuvres, parle au ressenti et à l’esprit, sans nous prendre pour des cons. L’indécision est aussi présente dans la fabuleuse évocation familiale de Tree of Life, qui occupe – donc – le cœur du film et représente – heureusement – la majorité de l’œuvre.

 

treeoflife1

         Petite parenthèse méritée pour évoquer ce cœur, intense et vibrant. D’une beauté éblouissante, porté par des acteurs formidables – Jessica Chastain et Brad Pitt méritent au moins tous les éloges – , l’épisode met les sens en éveil et bouleverse au plus intime. La mise en scène de Malick surpasse les attentes et réinvente l’enfance au cinéma.

 

         Revenons à nos petits. Ici, l’enchaînement violence-regret entre les deux frères est peut-être bien la scène la plus explicite du geste malickien : décrire un univers pluriel, ouvrir à l’interprétation multiple du monde ; en l’occurrence, ici, inné ou acquis ? Entre créationnisme et déterminisme, le film fait appel à la pensée individuelle. Auparavant, dans son chef-d’œuvre absolu Le Nouveau Monde, cette compréhension multiple ne se vivait que par l’image - raccords contre ce qui est à l’œuvre dans le champ -, ce qui, suivant les humeurs, pouvait aboutir chez un même spectateur à des interprétations différentes. – La preuve par l’exemple, ici. – C’est la narration qui en est ici responsable, rendant le film moins viscéral et plus intellectuel, distanciation qui conduit en partie à l'appréciation goguenarde de la scène finale.

 

         Tree of Life ne suscite pas l’engouement le plus total à la sortie de la salle mais travaille, stimule, hante durablement après sa vision. La tortue passe encore la ligne avec le sourire.

 

(1)  On n'a jamais reproché à un cinéaste la défense de son athéisme, laissons Malick nous parler de sa foi, d’autant qu’à aucun moment il ne semble montrer la moindre volonté de convertir.

(2) Notamment la citation initiale et l’évocation du livre de Job en cours de métrage.

 

 

                  Ben Evans (D.W.: must see / B.E.: indispensable)

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Cineflower
Publicité
Publicité